Prise au début comme rumeurs, la nouvelle est devenue plus rapidement une clameur. Toute la journée, les réseaux sociaux et médias ont suffisamment relayé la triste information de la disparition de l’Archevêque Émérite de Lomé, Monseigneur Philippe Fanoko Kossi Kpodzro. Tristesse, consternation et indignation ont été les sentiments qui se sont dégagés à travers les analyses et commentaires sur la toile et certaines chaînes de radiodiffusion togolaises. Pour certains, le prélat qui est mort en exil ce 09 janvier 2024 en Suède à l’âge de 93 ans, méritait un meilleur sort que celui-là. Désigné Président du Haut Conseil de la République (HCR) pour la transition lors de la décennie 1990, une équivalence du titre de Président de l’Assemblée Nationale actuelle, le prélat s’est toujours montré critique à l’égard de la gouvernance des Gnassingbé (père et fils). Désireux de voir de ses propres yeux l’alternance politique au Togo, Monseigneur Philippe Fanoko Kossi Kpodzro a été l’origine de la création d’un regroupement politique qui portait son nom: 《Dynamique Monseigneur Kpodzro》, en abrégé DMK qui avait porté et soutenu la candidature de Docteur Gabriel Agbeyomé Kodzo lors de la présidentielle de 2020, suscitant beaucoup de controverses. Du côté du pouvoir en place comme au niveau d’une frange de l’opposition, on apprécie mal certains propos et certaines actions du nonagénaire. À la suite de la défaite de son « protégé », Agbeyomé Kodzo, ancien Président de l’Assemblée Nationale et ancien Premier Ministre du Togo, qui estime jusqu’alors être le vrai vainqueur de la présidentielle de février 2020 et du coup « président légitimement élu par le peuple », l’on a assisté à une nouvelle forme de crise post électorale. Les leaders de la DMK y compris le candidat malheureux ont été arrêtés puis conduits devant le Service central de renseignement et d’investigations criminelles (SCRIC) où ils ont passé trois nuits avant d’être présentés au procureur de la république. Avant d’être relâchés le 24 avril 2020 soit 3 jours plus tard, ils ont été placés sous contrôle judiciaire. Craignant une nouvelle arrestation à la suite d’une autre convocation, l’ancien Premier Ministre, Dr Kodzo Agbeyomé a pris la poudre d’escampette pour se mettre à l’abri jusqu’à ce jour.
Monseigneur Philippe Fanoko Kossi Kpodzro a fini, pour sa part, d’opter pour l’exil. Le patriarche qui estimait aussi que sa sécurité était menacée a été exfiltré par le Haut Commissariat des nations unies pour les Réfugiés vers la Suède en avril 2021. Depuis son asile, il s’est toujours signalé par ses propos récriminatoires à l’égard du pouvoir de M. Faure Gnassingbé.
Ces derniers mois, des informations persistantes faisant cas de la dégradation de son état de santé ont énormément circulé. Dans l’opinion, certains avaient préconisé que l’État togolais et ses confrères (évêques) de la Conférence des Évêques du Togo (CET), quelle que soit la situation, fassent un effort pour qu’il rentre au pays avant son éventuel rappel à Dieu. Mais malheureusement, tel ne fut pas le cas. Il ne verra pas non plus de son vivant l’alternance politique pour laquelle il s’est battu ces dernières années. Quoiqu’il en soit, l’histoire retiendra son rôle assez déterminant lors de la Conférence Nationale Souveraine tenue du 08 au 28 août 1991 qui a donné aujourd’hui un certain vent de liberté de le paysage politique, médiatique et en matière des droits humains. C’est donc un défenseur des valeurs humaines et des principes démocratiques que le Togo vient de perdre, même si certains de ses pas sont susceptibles de critiques.
Repos éternel à son âme !
Israël De Dieu